C’est devenu une habitude aux Sables d’Olonne que se déroule dans la chapelle du collège Notre – Dame de Bourgenay à la mi – août le Festival José David qui fêtait cette année sa dixième édition. Cette année, quatre concerts auxquels s’ajoutait le » Concert famille » du 19 août. C’est grâce à Magali Goimard, sa directrice artistique que le Festival José David a acquis un degré de qualité qui n’a rien à envier à d’autres manifestations musicales tant dans la composition des programmes que dans le haut niveau musical, vocal ou instrumental de chacune des musiciennes et musiciens qui font vibrer le public de la chapelle chaque été.
Et cette dixième édition ne dérogea pas à la règle !
Le concert du lundi 14 août intitulé Paysages choisis nous fit voyager dans l’espace et dans le temps, de la Vendée, ses paysages marins et ceux du bocage grâce à José David et Louis Maingueneau, – découvert pour la plupart d’entre nous -, à l’Europe du Nord, celle de Sibélius et de Grieg ou bien à celle du Sud représentée par Pablo de Sarasate, Maurice Ravel et ses » Mélodies grecques » , sans oublier le Nantais Paul Ladmirault qui ne dépareillait pas aux côtés de Georges Gershwin.
Ce fut un programme riche en émotions, plein de fougue, de gravité et de recueillement que surent nous transmettre les trois artistes de cette première soirée. Magali Goimard, omniprésente au piano, dans le » Crépuscule marin » de José David, ou infatigable complice de la très fidèle Cécilia Arbel nous transportant de sa voix ample et généreuse dans les » Mélodies grecques » de Ravel ou nous faisant pénétrer dans l’intimité de Verlaine et ce superbe » Clair de lune » mis en musique par Fauré. Cécilia n’oublie jamais de nous rappeler ses talents de comédienne, par exemple dans le tonitruant rappel dans un air extrait de » La Princesse Czardas « , opérette du Hongrois Emmerich Kalman, soutenue au piano par Magali et au violon par François Pineau – Benois que le public a eu la plaisir d’entendre à nouveau, montrant toute sa virtuosité dans le redoutable caprice de Paganini, » La cornemuse « , nous entrainant avec la pianiste dans le mouvement effréné du » Zapateado » de Sarasate ou dans la suite de Porgy and Bess adaptée au violon par Heifetz. Et que dire après tous ces moments de musique intense de la très belle » Berceuse créole » de Paul Ladmirault pour violon, voix et piano que les trois musiciens rendirent avec une grande intériorité.
Ce qu’il y a de bien avec Magali Goimard, c’est cette capacité à mêler les genres, les époques, mais aussi à faire découvrir des compositrices et compositeurs que le temps a effacés mais que l’on a plaisir à découvrir, tel ce Louis Maingueneau, ami de la famille David ou encore le Nantais Paul Ladmirault que l’on aimerait entendre plus souvent.
Comme toujours, des applaudissements chaleureux remercièrent les trois acteurs de cette première soirée.
F Pineau – Benois, M Goimard, C Arbel : José David » Ave Maria »
( Pour voix, violon et piano )
Le concert du mercredi 16 août était entièrement consacré à Sarah Bernardt Femme de légende dont Magali Goimard s’appuyant sur un diaporama complet retraça la vie et la brillante carrière. Rappelant les grands rôles de la tragédienne, en parallèle avec ceux que la Callas interprétera à l’opéra au XX ème siècle, seule ou avec ses invités de choix, le violoniste François Pineau – Benois et le flûtiste Jérôme van Wynsberge, Magali a fait partager au public des oeuvres incontournables comme le belle » Sonate pour trio » de Purcell qui ouvrait ce deuxième concert, l’allegro de la » Sonate en la mineur » de Mozart ou encore , plus près de nous » Le magicien » de Reynaldo Hahn, nous faisant découvrir par ailleurs les » Trois pièces en trio » de César Cui, les » Médailles antiques » de Philippe Gaubert ainsi que la composition » O corta Jaca » de la Brésilienne Chiquinha Gonzaga. Chacun des musiciens donnait le meilleur de lui – même, qu’il s’agisse du brio du violoniste dans la sonate de Mozart ou de la décontraction du flûtiste qui n’empêche pas un jeu tout en finesse.
Bien sûr le festival ne serait pas ce qu’il est sans la voix exceptionnelle de la soprano Cécilia Arbel dont chaque interprétation souleva l’enthousiasme du public, aussi bien dans l’air de Cléopâtre de Haendel, dans » Une flûte invisible » de Saint – Saêns sur un poème de Victor Hugo ou dans l’intrépide » Sento un interna voce » de Rossini, extrait de l’opéra Elisabetta, Regina d’Inghilterra.
Le cinéma ponctuait cette belle soirée par la projection d’un film rare consacré aux villégiatures de Sarah Bernardt à Belle – Isle, avec l’accompagnement sous – jacent du trio piano, violon, et flûte.
Cécilia Arbel dans » La paix de blanc vêtue » d’A Messager
Le public après des applaudissements nourris, mais toujours insatiable, rappelait les quatre artistes qui se firent un plaisir d’interpréter » La valse de Paris » de Maurice Yvain, permettant à chacune et chacun de quitter la chapelle après avoir vécu encore une fois de beaux moments musicaux.
Pour ce troisième concert du 18 août intitulé Printemps, Magali Goimard avait invité le choeur pour voix mixte » Fiat Cantus » et son chef Thomas Tacquet ainsi que le jeune ténor Kaëlig Boché.
Pour une découverte, ce fut une découverte, dans une soirée où chaque artiste a trouvé sa place et montré son talent : pour la pianiste, le flûtiste et la soprano, la démonstration n’est plus à faire … Mais quel bonheur ce fut d’entendre ce choeur soit a capella, soit accompagné par Magali Goimard qui pour un soir laissa souvent le piano au chef du choeur lui – même qui, non content de diriger les 16 femmes et 8 hommes qui composent le choeur d’une façon énergique, a montré aussi qu’il était un excellent pianiste. Sans citer tout le programme, nous nous souviendrons plus particulièrement de » Les heures sont des fleurs » de Robert Caby, disciple d’Erik Satie dont il valorisa l’oeuvre au détriment de ses propres compositions. Le public put aussi découvrir la non moins excellente soprano soliste du choeur chantant avec une grande conviction » Les Elfes des bois » de Cécile Chaminade, soutenue par un ensemble parfaitement à l’unisson ou encore le très touchant » Soir sur la plaine » de Jacques de la Presle qui sera le professeur d’harmonie de José David au conservatoire de Paris.
Cécilia Arbel, elle aussi en osmose avec le choeur donna une interprétation toute colorée des » Filles d’Arles » de Cécile Chaminade. Quant au jeune ténor, ayant déjà de beaux rôles à son actif, il nous émut dans la célèbre déclaration d’amour de Don José à Carmen. Cela ne l’empêcha pas de montrer toute la puissance et la justesse de sa voix dans » Vraiment ma bien – aimée » extrait du Roi d’Ys d’Edouard Lalo. Outre la découverte de Robert Caby, les auditrices et auditeurs eurent aussi le plaisir d’entendre la musique de Guy Ropartz – là aussi à l’image d’un Paul Ladmirault, injustement méconnu – notamment dans une belle élégie à deux voix avec piano » La fleur d’or » où ténor et soprano formèrent un duo de qualité, chaque interprète mettant en valeur le chant de l’autre. La soirée se terminait en apothéose avec un bel hommage à José David dans une interprétation éblouissante de la composition » Au large « , réunissant tous les interprètes de la soirée .
Le public une nouvelle fois enthousiaste se levait pour applaudir les musiciennes et musiciens et le choeur Fiat cantus achevait la soirée pour interpréter a cappella » Le calme des nuits « , montrant devant une chapelle silencieuse toute la beauté de la musique produite par la seule voix humaine.
Photo de groupe : le choeur Fiat Cantus et son chef entourent C Arbel, J van Wynsberge, K Boché, M Goimard dans la Cour de la Vierge du collège
Le samedi 19 août, un jeune public et leur famille put entendre ou réentendre la célèbre Histoire de Babar, le petit éléphant ainsi que d’autres contes de Michèle Goimard, sur des musiques de Francis Poulenc, racontés par Michèle Larivière, complété par deux oeuvres de José David non dénuées d’humour » Badinage pour piano » et » La leçon de chant « , le concert s’achevant par l’une des » Gnossiennes » d’Erik Satie.
Un beau moment de musique et de poésie pour petits … et grands !
L’art de Maria Callas
Dimanche 20 août . Pour ce dernier concert du Festival, Magali Goimard avait choisi de rendre hommage à Maria Callas, et au Bel Canto pour le centième anniversaire de la naissance de la Diva. Après la soirée » didactique » consacrée à Sarah Bernardt, ce fut cette fois – ci à un véritable concert – lecture auquel le public qui avait rempli la chapelle en ce dimanche soir assista. Michèle Larivière, déjà présente au Festival en 2021 pour évoquer la mémoire de José David et Geneviève Rex retraça avec beaucoup de clarté et non sans émotion parfois la vie et la carrière de la célèbre cantatrice, riche diaporama à l’appui, n’hésitant pas à établir quelques parallèles avec celles de la tragédienne française. Cette artiste capable de chanter dans tous les registres et qui remit le Bel Canto au goût du jour. Pour en illustrer les différentes étapes, Cécilia Arbel reprit avec tout l’engagement qu’on lui connaît, mais aussi tout ses talents de comédienne et de tragédienne les airs les plus célèbres commençant par une interprétation tout en nuances de » Casta Diva » extrait du Norma de Bellini. Elle fut aussi une éblouissante Tosca, implorant le policier Scarpia de libérer son amant le peintre Mario Rossi. Rappelons que ce fut le premier grand rôle de la Callas qu’elle interpréta dès l’âge de 19 ans ! Il y eut aussi ce très beau » Siempre libera « , véritable hymne à l’amour, l’un des airs les plus célèbres de » Traviata » de Verdi, l’un des compositeurs fétiches de Maria Callas. Mais tout cet art du chant qu’a déployé Cécilia Arbel et qu’elle déploie chaque année dans le choeur de la chapelle n’aurait pas cette ampleur et cette chaleur qui séduit tant le public sans les qualités pianistiques de Magali Goimard dont l’infatigable présence au piano se joue de toutes les difficultés des différentes partitions pour offrir au public une complicité de chaque instant avec la soprano. Cette complicité qu’ elle partage aussi avec les autres interprètes qu’elle met en valeur, tant dans la musique de chambre que dans les airs d’opéra ou même parfois les chants du terroir. Seule au piano, elle a une nouvelle fois montré l’étendue de son talent, que ce soit dans l’ouverture de » la Force du Destin « ou dans la » Consolation n° 2 » de Liszt, n’oubliant pas José David auquel elle a consacré un CD entier sorti au printemps, et interprétant avec finesse, énergie et profondeur le très beau » Devant les ruines de l’abbaye « .
Conférencière, pianiste et cantatrice furent ovationnés par le public qui avait rempli la chapelle pour ce dernier concert d’un Festival riche en émotions musicales.
Que tous ces artistes en soient grandement remerciés avec toutes les émotions qu’ils nous ont fait vivre.
2023 a vécu … et de quelle façon.
Espérons que l’édition 2024 soit aussi belle, de musique, mais aussi de rencontres et ce n’est pas le moindre des charmes ce festival sablais.
Rappelons la sortie en avril du CD consacré à l’oeuvre pianistique de José David par Magali Goimard : » José David Piano Works »
En voici le contenu : 1 Crépuscule marin
2 4 6 9 Impressions de Vendée :
I Devant les ruines de l’abbaye
II Le bocage mystérieux où plane le souvenir
III Le marais et ses moulins
IV Face à l’océan
3 Valse Polifonic
5 Thème et variation sur » O Filii et Filiae »
7/8 Etude et danse
10 Badinage
11 Evocation vespérale
Quelques beaux moments de musique à écouter pour la modique somme de 15 €